Bondamanjak

CANAL + : KARL ZERO MOINS UN

Viré. Karl Zéro est viré de Canal +. En juin, c’en sera fini du Vrai Journal. En fait, selon nos informations, la décision remonte à juin 2005. A ce moment-là, en même temps que son contrat était reconduit pour un an, Zéro a reçu une lettre de résiliation. Pourquoi ce délai ? En raison de l’antériorité de ses relations avec Canal + ­ Le Vrai Journal en est à sa dixième saison ­ et parce que sa société de production est en position de «dépendance économique» par rapport à Canal + : les avocats de la chaîne cryptée ont décidé de lui octroyer un préavis de douze mois. Formule usée. Pourquoi cette éviction ? Le Vrai Journal recueille de bonnes audiences mais la formule est usée. Surtout, c’est le prix de ses dérives dans l’affaire Alègre que Karl Zéro est en train de payer. En juin 2003, dans la tourmente médiatique qui a entouré les fausses accusations de deux ex-prostituées et du tueur en série Patrice Alègre, notamment contre Dominique Baudis, Karl Zéro s’est particulièrement illustré. En produisant à l’antenne une lettre d’Alègre, en interviewant sans précaution les ex-prostituées… Et même en versant 15 000 euros à l’une d’entre elles ­ somme dont il a plaidé qu’elle était un à-valoir sur un livre. Une transaction que la direction de la chaîne a du mal à avaler. Mais pas si simple de se débarrasser de celui qui, pendant dix ans, au cours d’interviews faussement insolentes et vraiment cire-pompes, a tutoyé les hommes politiques. D’abord, Stéphane Courbit, président d’Endemol (Star Academy, Loft Story), actionnaire à 50 % de la société de production de Karl Zéro, tente de sauver son poulain. Plus choquante est la valse des pressions politiques qui s’enclenche ensuite. Bertrand Méheut, PDG de Canal +, reçoit d’amicaux coups de fil : des hommes politiques font savoir qu’ils aiment beaucoup Karl Zéro. Parfois, ils font appeler, c’est le cas de Nicolas Sarkozy. Parfois, ils prennent directement leur téléphone, c’est le cas de Laurent Fabius. Puis tout se calme : en apparence, le contrat est reconduit et Zéro est à l’antenne en septembre. Mais au début de 2006, les pressions repartent en même temps que le bruit de son éviction. Cette fois, Sarkozy en personne appelle Méheut, Fabius remet ça, et Dominique Strauss-Kahn, par l’entremise d’un tiers, s’y colle. Tournée. Il y a quelques semaines, le Nouvel Observateur évoque le départ de Karl Zéro dans un confidentiel. Mais Canal + refuse de confirmer : trop tôt, et surtout la chaîne ne veut pas voir repartir les pressions. Niant alors qu’il est au courant, Karl Zéro entame une tournée des journaux, démentant à tour de bras, évoquant de futurs projets avec Canal +, et se faisant même interviewer dans VSD par ses amis les hommes politiques. Joint par Libération hier, il remet ça : «La question de l’arrêt du Vrai Journal se pose chaque année, des nécrologies de Karl Zéro j’en ai lu des dizaines, mais Canal + ne m’a pas clairement dit que c’était fini. J’ai proposé une émission sur les jeunes talents issus des minorités, et j’ai un projet d’émission politique façon David Letterman.» Mais si Canal + a accepté le tournage d’un pilote sur les talents des cités afin de donner un os à ronger à Karl Zéro, elle a déjà la tête ailleurs : vers d’autres chaînes où elle fait de l’oeil à certains animateurs. Et aussi vers l’agence Capa qui, selon nos informations, travaille déjà à un projet d’émission politique présentée par Victor Robert (i-télé) pour succéder au Vrai journal. Source: Libération