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Clin d’œil de borgne à Jean-Claude Duverger élu de la Collectivité de Martinique

Clin d’œil de borgne d’un blog privé à Jean-Claude #Duverger élu de la Collectivité de Martinique.

TGI Bordeaux 20 octobre 2008, n°de parquet 0825760
Quand Mme le maire fait embaucher successivement trois de ses filles au service de sa commune, le tribunal correctionnel voit rouge, même si l´un des recrutements a été effectué par voie de détachement. [1]

Le 7 octobre 1998, une commune du Sud-Ouest (160 habitants) crée un poste d´agent administratif pour tenir l´agence postale et le secrétariat de la mairie. La convention passée entre la commune et La Poste, prévoit que l´agence est tenue par un agent de la commune qui peut se voir affecter des tâches administratives (à condition qu´elles ne constituent pas une gêne pour les activités postales). En contrepartie, La Poste s´engage à verser à la commune un peu moins de 450 euros mensuellement.
Le 1er novembre 1998, la fille du maire est recrutée à temps partiel sur le poste. Elle l´occupera pendant cinq ans avant de démissionner. Elle est remplacée par un agent administratif. Après un congé maternité, suivi d´un congé parental, celle-ci est elle même supplée par… une deuxième fille du maire. La sous-préfecture invoque l´illégalité d´une telle embauche en raison du lien de parenté entre le maire de la commune et l´agent recruté. Le maire accepte de rapporter l´arrêté de nomination et de remplacer sa deuxième fille, initialement pressentie, par une… troisième fille détachée par le centre intercommunal d´action sociale.
Comme pour le premier recrutement, le contrôle de la légalité ne s´aperçoit de rien, la fille ne portant pas le même nom patronymique que sa mère, le maire de la commune. De retour de son congé parental, la personne recrutée initialement, reprend son emploi en juillet 2007 avec un salaire inchangé. Ne pouvant exercer la plénitude de ses missions qui sont désormais confiées pour l´essentiel à la fille du maire, elle alerte la Préfecture laquelle saisit le parquet. Poursuivie pour prise illégale d´intérêts, l´élue expose, pour sa défense, « que le statut de détachement, position statutaire, prévue par la fonction publique, lui permet d´échapper à la prohibition de recruter une parente, puisqu´elle en bénéficie sans l´avoir initié ». En outre « ce recrutement n´est pas une entreprise ou une opération au sens de l´article 432-12 du code pénal » et le « détachement n´a eu aucun impact avantageux sur le déroulement de la carrière de sa fille ».

Peu importe lui répond en substance le tribunal correctionnel de Bordeaux qui la condamne à 2 000 euros d´amende avec sursis et un an d´interdiction des droits de vote et d´éligibilité (bien conseillée, l´élue a néanmoins obtenu le relèvement de la peine de radiation des listes électorales pour cinq ans qui résulte en principe de plein droit des condamnations prononcées pour ce type d´infractions en vertu de l´article L7 du Code électoral) : en signant l´arrêté de nomination de sa fille, « profitant de la différence des noms pour tromper la vigilance du contrôle de légalité sur le lien de filiation, avec la complicité du président du CIAS (…) parfaitement informé du lien de filiation, Madame X…, investie d´un mandat électif, assurant la surveillance de ce recrutement et assurant le paiement comme exécutif communal, a sciemment mis en place un lien juridique dont elle pouvait espérer tirer bénéfice, pour elle et pour sa fille, caractérisant ainsi l´intérêt moral et familial visé par la loi ». Et « l´infraction est caractérisée, même en l´absence de bénéfice effectif quelconque pour l´une ou l´autre des parties, ou de préjudice pour la collectivité ».

Ce qu’il faut en retenir

Constitue le délit de prise illégale d´intérêts, le fait pour un élu de recruter l´un de ses proches y compris par voie de détachement statutaire. Peu importe que la commune n´ait subi aucun préjudice et que le proche du maire n´ait tiré aucun profit de son recrutement (notamment en terme d´avancement ou de rémunération).