Bondamanjak

Desperate outhouse?

Diaspora : force ou faiblesse ?

Alors la prophétie Césairienne s’envole et le « retour au pays natal » prend des airs saisonniers selon les desideratas de nos bien-engraissés gros porteurs ravisseurs. A force « d’ailleurs » comme règle et de « chez soi » comme exception les pistes se brouillent dans un joyeux « fouyaya ». L’antillais se « négropolise » et se distancie peu à peu de l’antillais autochtone, lassé de s’entendre dire qu’il est assimilé, lassant de l’entendre répéter « qu’il ne peut plus s’habituer à la mentalité locale ». L’écart se creuse entre des frères jumeaux qui auraient perdu leur miroir, quelque part… dans l’océan Atlantique.

 

Ainsi, à la différence d’autres communautés qui vivent leur diaspora comme un atout géostratégique pour la valorisation outre frontières d’une culture spécifique, nous nous retrouvons à vivre notre diaspora dans une ambiance parfois « skyzophrénique »  hésitant entre rejet et revendication réciproque…

Comment expliquer notre sentiment local palpable que les « nèg la fwans’ » ne sont pas de vrais antillais. Souvenons-nous de cette condescendance attendrie que nous avons eu vis-à-vis de ceux-là même alors qu’ils manifestaient à Paris en février 2009 avant de constituer le 5ème DOM des Etats généraux. Jusqu’à leur désinformation[1] nous étions prêts à leur reprocher !

 

Que dire également de nous, antillais en exil, qui avons endormi notre fibre locale par accoutumance aux codes de vie mégalopolitains et dans le confort d’un nomads land entre « le dehors » et « le dedans »  finalement sécurisant car anonyme et individualiste ? « Les voyages forment la jeunesse » disait Saint-Exupéry. Assurément. Cette ouverture est sans conteste un enrichissement formidable dès lors qu’elle ne présuppose pas la table rase de notre culture propre elle-même métissée. Culture à vivre comme un atout décloisonnant plutôt que comme le sceau d’une exclusion qu’il faudrait gommer. Notre culture aussi saura enrichir l’autre, croire en elle serait un bon début…

 

A noter que mon « je » est en vadrouille entre les « nous » diasporiques et les « nous » autochtones. C’est une posture itinérante assez déroutante que de choisir de se construire dans un aller-retour nutritif entre « l’ici » et « l’ailleurs » en veillant à toujours s’équiper de la sacro-sainte clef du discernement. C’est elle qui nous permettra de revenir « ici » avec le meilleur « d’ailleurs » jamais dans l’assimilation, toujours dans la conscience-motrice et sereine de son identité. Le « meilleur ? », il se définit logiquement à la lumière d’un projet de société consensuel et démocratiquement validé.

 

Pour une politique d’incitation au retour

Ce retour physique régulier est (à mon sens) fondamental -et l’argument d’une « e-society » ne fait pas l’affaire – car une société et surtout un projet de société ont besoin de toutes les forces vives consentantes. Ils se vivent, s’éprouvent dans l’immersion, au contact de notre « substance humaine dynamique ». C’est ce contact qui permettra de gagner en légitimité, en re-connaissance de nous, par nous et par les autres pour une société solidaire, respectueuse d’une diaspora volontaire qui à son tour ne rechigne pas à mettre la main à la pâte.

 

De façon plus pragmatique, à toutes ces considérations s’ajoute la donne démographique[2] qui rend indispensable d’organiser rapidement un « bumidom inversé », pour un retour aux pays des forces vives, accessoirement futurs payeurs les retraites des nos (nombreux) parents.

C’est peut-être en donnant aux sociétés autochtones et diasporiques les moyens opérationnels de se ré-apprendre mutuellement que nous parviendrons à réaliser, comme d’autres le font, cette chaîne humaine solidaire sans frontières fière de sa culture, résolument ancrée dans un monde moderne et tendue vers un même projet de développement.

 

 

Humaniste par culture, laminaire par nature.

 

 

M.M.

 

 

 

[1] Construite de toutes pièces par des médias nationaux envoyés spéciaux plus intéressés à traquer la goutte de sang qu’à rendre compte de l’ « avancée » des négociations.

 

[2] Projections à l’horizon 2030 (sources :INSEEhttp://insee.fr/fr/themes/document.asp?reg_id=23&ref_id=12111&page=cahiers%2FProjPop%2FCAG_PP07_03.htm )

En Guadeloupe, si les tendances démographiques se poursuivent, la population sera de 548 000 habitants en 2030. La part des moins de 20 ans sera de 26 %. Les plus de 60 ans représenteront 31 % de l’ensemble de la population, contre 15 % actuellement. L’âge moyen d’un guadeloupéen sera de 41,8 ans (34,6 ans en 2005).En Martinique, si les tendances démographiques se poursuivent, la population sera de 427 000 habitants en 2030. La part des moins de 20 ans sera de 23 %. Les plus de 60 ans représenteront 34 % de l’ensemble de la population, contre 17 % actuellement. L’âge moyen d’un martiniquais sera de 44,0 ans (36,4 ans en 2005).