Bondamanjak

En Martinique, les prix sont-ils tombés sur la tête ?

Le système de l’autorégulation ne semble pas fonctionner pour nous, dans nos îles étroites. Les prix des marchandises sont même parfois fixés en dépit du bon sens par des moyens que la morale m’interdit d’exprimer ici par respect pour nos lecteurs. Si bien que certaines
marchandises atteignent des prix de produits de luxe alors qu’elles n’en sont pas, ou sont vendues à un prix qui n’a aucun rapport avec leur valeur initiale. Le consommateur le sait et les martiniquais sont de plus en plus furieux de cette situation. Ils communiquent entre eux (précisément, l’île est petite et tout se dit, se répète, et peut s’enflammer…). On a enregistré actuellement une baisse de la consommation (4 fois moins que d’habitude). Cette baisse de la consommation est liée à l’endettement colossal des ménages (là encore, on n’en parle pas, comme s’il était tabou d’évoquer ces questions…).

Sur RFO, au cours d’une interview, les commerçants ont avancé l’hypothèse d’une déprime des consommateurs à la suite du crash. (NDLR : C’est plutôt leur cerveau qui est victime du crash)-Cette hypothèse nie la réalité  martiniquaise. Les commerçants ne veulent pas regarder les choses en face : ils ont tellement profité des consommateurs, pratiqué des marges inadmissibles que les consommateurs sont à bout. Le système se mord la queue. Là encore on ne prend pas ses responsabilités. C’est la politique de l’autruche. Bientôt la baisse de la consommation sera liée au réchauffement de la planète. Comment des journalistes dignes de ce nom peuvent-ils ne pas commenter ce genre de propos ?

La situation est en fait explosive. Les martiniquais s’organisent, essayent de trouver des solutions afin de « contourner les marchés habituels de la grande distribution ». Situation, là encore, que l’on ne trouve que dans des situation de conflits. M. B , qui est mère de cinq enfants, est  révoltée. Elle insiste sur le fait que cette année, elle ne veut pas consommer, car « elle en a marre de se faire avoir ». C’est là le vrai problème de la baisse de la consommation.  Les consommateurs sont excédés. Certaines personnes parlent même de « résistance » pour
désigner une attitude qui consisterait à  ne pas acheter des produits aux marges manifestement trop importantes et à limiter sa consommation au strict minimum. Si bien que les petits commerçants commencent à subir les effets de ces comportements et  connaissent de grandes difficultés pour boucler leurs fins de mois. « Tout est payé à crédit » m’a confié l’un d’entre eux.
La solution est sans doute entre les mains des citoyens, car enfin, ne faut-il pas reconnaître que l’ordonnance du 1er décembre 1986 est un vrai fiasco chez nous et conduit à l’endettement des citoyens ?  Face à cette situation, les consommateurs optent pour des attitudes différentes. L’histoire peut-elle expliquer cette attitude de soumission que nos compatriotes martiniquais adoptent quelquefois ?  « Il nous faut des neg-mawon de la consommation » m’a exclamé un collègue.
Lorsque l’on évoque ces problèmes en présence de commerçants, ils évoquent tous les « coûts du transport  et l’octroi de mer ». Evidemment, on s’y attend, aucun ne va oser dire : c’est vrai on exagère, on fait n’importe quoi et on est en train de payer… le revers de la médaille…
 L’octroi de mer est l’excuse des commerçants mais n’est pas seul responsable. X. B, un consommateur affirme : " Comment ils  (les commerçants) peuvent dire une chose pareille puisque les yaourts par exemple, D….et  Y… sont produits ici, qu’est-ce qui justifie qu’on les vende à 7 euros  (45,50 F)."
Il m’a même été dit : « Mais il ne faut pas convertir ! » Voilà une attitude intéressante que les commerçants espèrent évidemment des martiniquais.
Si certains commerçants et employés du commerce ont vu leurs revenus augmenter. Je rappelle aux commerçants que le passage à l’euro n’a pas été suivi d’une augmentation des salaires des fonctionnaires  et des salaires en général. Lorsque  les salaires n’augmentent pas, il ne peut y avoir de croissance, car la consommation ne peut augmenter .

Le système a donc une fin. On assiste peut-être aujourd’hui, à ses limites…

Marie-Line Boulogne.