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Gloriyé Septanm 1870 : Vers une légitime restitution

Lévé Matinik Pli Wo. Déclaration politique : APM – CNCP – MIM – MODEMAS – PALIMA – PCM – RDM

Depuis plusieurs dizaines d’années, un puissant mouvement de recherche et de reconnaissance de l’histoire Martiniquaise se développe. L’épais voile colonial qui tentait de présenter notre peuple comme une « population » sans histoire propre, est définitivement déchiré.

L’héroïque insurrection du sud, survenant seulement 22 ans après la révolution antiesclavagiste du 22 mai 1848, est aujourd’hui contée, analysée, chantée, célébrée……

Il est toujours nécessaire de rappeler les faits déclencheurs de cet important évènement.

Léopold LUBIN, jeune artisan originaire du Marin est injustement « cravaché » par un fonctionnaire français…. Cet incident provoquera un mouvement d’une grande ampleur qui dépassera rapidement les« frontières » du sud du pays.

Cette insurrection sera durement réprimée par les autorités françaises avec la mise sur pied d’un « conseil de guerre » à cette occasion.

Armand NICOLAS, historien martiniquais, nous fournit un important témoignage du directeur de l’intérieur, exprimé en septembre 1863, à propos de la misère qui régnait dans le pays à la veille des évènements : « les misères sont tellement nombreuses (…..) que ni les subsides des communes, ni les œuvres multiples de la charité privée, ni les efforts des sociétés religieuses ne peuvent pourvoir que dans une limite très insuffisante, au soulagement de l’indigence. » (sources : « L’insurrection du sud à la Martinique » d’A. NICOLAS publié en décembre 1970.)

Gilbert PAGO, autre historien martiniquais nous livrera les conditions d’injustice qui régnaient à cette époque en Martinique (Sources : « l’insurrection de Martinique 1870 – 1871 » de G. PAGO). : « Les nostalgiques de l’esclavage chez une importante partie des planteurs soutenus par le zèle des gouverneurs coloniaux réaffirmèrent les pratiques ségrégationnistes (…..). Dès lors, on imposa le travail forcé aux anciens esclaves, assorti de l’interdiction de changer de patron (…). On limita les déplacements en exigeant pour les travailleurs des passeports entre les différentes parties du pays. On instaura des camps d’internement dits « ateliers de discipline » pour les récalcitrants dans les pitons du centre de l’île ».

C’est dans ce contexte d’injustice et de racisme qu’éclate l’insurrection du sud ou encore de Martinique, durant les 22, 23, 24, 25, 26 septembre avec des conséquences qui s’étendirent jusqu’en 1871.

Dès lors, la volonté constante des autorités françaises a été de présenter les acteurs héroïques de ce mouvement comme de dangereux criminels. Et ce fut le seul son de cloche qui traversa nombre de décennies….

L’analyse qu’en fait Victor SCHOELCHER ( pourtant partisan de l’abolition de l’esclavage en 1848) nous éclaire sur l’idéologie dominante à cette époque chez les hommes politiques français : « Il y a trois ans, quelques malfaiteurs, profitant des désastres de la mère-patrie et favorisés par des circonstances fatales, levèrent l’étendard de la révolte. Leur soulèvement a été comprimé en peu de jours. Il n’a pu dépasser les limites du quartier où il aurait éclaté. Toutes les classes de la population ont fourni des volontaires pour l’y étouffer.

Ses chefs, au nombre de huit, ont payé leur crime de la peine capitale. Les malheureux qu’ils avaient égarés expient leur complicité au bagne et dans les prisons. (…) » (Sources : « l’esclavage, du souvenir à la mémoire » de Christine CHIVALLON, directrice de recherche au LAM-CNRS).

Répression et maintien des privilèges des gros planteurs furent donc les réponses des autorités.

Depuis quelques années, le travail de restitution historique, de réhabilitation du parcours et du sacrifice d’hommes et de femmes, souvent jeunes, luttant pour la justice, contre le racisme, fait de grands bonds en avant. C’est la fierté retrouvée pour leurs descendants directs et pour tout un peuple conscient du sens émancipateur de l’insurrection de Martinique avec la naissance d’un sentiment national.

Aujourd’hui enfin, on peut commencer à imaginer l’épopée de Louis TELGA, 45 ans, l’un des chefs de l’insurrection ( jamais retrouvé ) et de ses compagnons parcourant mornes escarpés, bourgs, campagnes, et portant bien haut l’idéal d’une autre Martinique…

Signataires : septembre 2013

APM – CNCP – MIM – MODEMAS – PALIMA – PCM – RDM

Lévé Matinik pli wo !