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Jacques Chirac veut la suppression du texte sur la colonisation

Jacques Chirac a demandé la saisine du Conseil constitutionnel en vue de la "suppression" de la mention du "rôle positif" de la colonisation française, a annoncé la présidence de la République. Le Conseil constitutionnel doit dire si l'alinéa controversé de la loi de février 2005 est bien du domaine réglementaire et non législatif. Si c'est effectivement le cas, le gouvernement le supprimera par décret. Cette procédure permettra d'éviter un nouveau débat au Parlement sur ce dossier polémique et de court-circuiter les réticences de certains élus de la majorité, qui s'étaient opposés en novembre à son abrogation. "Sur la base des propositions qui lui ont été faites, le président de la République souhaite que le Conseil constitutionnel (…) puisse se prononcer sur le caractère réglementaire du deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 23 février 2005 en vue de sa suppression", indique l'Elysée dans un communiqué. Cet alinéa stipule que "les programmes scolaires reconnaissent le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l'histoire et aux sacrifices des combattants de l'armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit". Une pétition contre cette disposition a recueilli plus de 46.000 signatures, dont celles de nombreux historiens et juristes de renom. Le Premier ministre, Dominique de Villepin, a fait savoir qu'il saisissait immédiatement le Conseil constitutionnel. "Si le Conseil constitutionnel juge que ces dispositions ne sont pas du domaine de la loi, le Conseil d'Etat sera saisi (…) d'un projet de décret supprimant cet alinéa du texte de la loi", a indiqué Matignon dans un communiqué. "Le Président de la République", a souligné l'Elysée, "considère que la loi du 23 février 2005 rend un juste et nécessaire hommage à tous les Français rapatriés et aux combattants de toutes origines de l'armée française". "Mais le deuxième alinéa de l'article 4 suscite des interrogations et des incompréhensions chez beaucoup de nos compatriotes. Il convient de les lever pour retrouver les voies de la concorde. La Nation doit se rassembler sur son histoire." "DES FAITS QUI RELÈVENT DE L'HISTOIRE" En se prononçant pour la suppression et non la réécriture du texte, Jacques Chirac a suivi la recommandation du président de l'Assemblée nationale Jean-Louis Debré, qu'il avait chargé le 9 décembre d'une "mission "pluraliste pour évaluer l'action du Parlement dans les domaines de l'histoire et de la mémoire". Jean-Louis Debré a remis ses conclusions mercredi soir et la décision de Jacques Chirac a été annoncée dans la foulée. Le chef de l'Etat s'était initialement prononcé pour une réécriture. Lors de ses voeux le 4 janvier, il avait même annoncé que l'article incriminé serait "réécrit" dans le cadre d'une proposition de loi rédigée par Jean-Louis Debré. Dans un communiqué, ce dernier a rappelé mercredi soir "qu'à de multiples reprises, il a précisé que ce n'est pas à la loi d'écrire, de commenter ou de porter un jugement sur des faits qui relèvent de l'Histoire". Il a ajouté qu'après avoir longuement consulté diverses associations, des juristes, des historiens et des parlementaires, il "souhaite la suppression de cet alinéa 2". Bernard Accoyer, président du groupe UMP de l'Assemblée, a "salué la décision d'apaisement et de rassemblement du président de la République". "Les Français doivent se rassembler autour de l'histoire de notre pays. C'est ainsi que nous pourrons continuer à avancer tous ensemble dans la cohésion et l'unité nationale", a-t-il déclaré dans un communiqué. En revanche, Jean-Pierre Brard, député apparenté communiste, a eu une réaction mitigée. "Ce n'est pas satisfaisant parce qu'on aurait plutôt attendu une autocritique. Mais je pense que c'est la raison qui l'emporte", a-t-il dit à Reuters, rappelant que, s'agissant de la colonisation, "la France n'a pas à être particulièrement fière de son passé".

Source: PARIS (Reuters)