Bondamanjak

La morale en politique

La nouvelle collectivité  sera une collectivité sui generis. Il en est tiré la conclusion que n’entrant  dans aucune catégorie connue, elle n’aurait pas d’existence juridique. Le droit commun. Rien que le droit commun.  Position d’une fraction de la Droite, celle que l’on pourrait qualifier d’archaïque, dont Claude LISE se réclame benoitement. Il ne sait pas identifier une collectivité sui generis mais le Conseil Constitutionnel, lui, sait.  La formule latine dont la consonance plait manifestement au Président du Conseil Général signifie qu’il s’agit d’un modèle unique. Est-elle pour autant contraire à la Constitution ? Non. Trois fois Non. Dans sa décision 82-138 DC, la Haute Juridiction indique que « la Constitution n’exclut nullement la création de collectivités territoriales qui ne comprendraient qu’une unité». Pour la bonne raison que la Constitution reconnait l’expression institutionnelle des particularismes. L’objet est, donc,  n’en déplaise au Sénateur, parfaitement identifié.

A partir de ces prémisses, le RDM et ses alliés abordent le point central de leur prétendue démonstration. Se présentant en exégètes de la volonté populaire, ils prétendent que les compétences de la nouvelle collectivité se limitent à l’addition des compétences de l’actuel Conseil Général et de l’actuel Conseil Régional. L’unification institutionnelle implique nécessairement la rénovation de la gouvernance territoriale. Il  s’agit d’une conséquence naturelle de la mise en œuvre des principes de la décentralisation. D’autant que les compétences demandées s’inscrivent évidemment dans le cadre de l’article 73 de la Constitution et que le Président de la République a, d’office, octroyé une compétence dans le domaine des relations internationales.

Le MAP y reviendra longuement et, comme d’habitude, il expliquera clairement la justesse de sa position. Pour l’ heure, il veut souligner que la position démagogique qui consiste à soutenir qu’il ne faut pas aller plus loin que ce qui aurait été exprimé par la volonté populaire pose un réel problème de morale politique.

La situation est simple. Le vote des Martiniquaises et des Martiniquais, le 24 janvier 2010, permet une avancée limitée mais indiscutable dans le processus de responsabilisation. Le Président de la République ne s’y oppose pas. Il l’a fait savoir avant même les consultations dans son discours du 26 juin 2009 : « On pourrait imaginer dans un premier temps, la création d’une collectivité unique de l’article 73, assortie d’un pouvoir normatif renforcé. ». La Ministre des Outre- mer a, de son coté, fait savoir qu’il n’y a pas d’obstacle à ce que la durée des habilitations soit étendue. Ces possibilités correspondent à l’intérêt supérieur de la Martinique et, par conséquent, même si elles se situent en deçà des positions des partisans de l’article 74, elles constituent un progrès.

Les partisans d’un changement plus affirmé refusent l’évolution et, affichant un esprit démocratique qu’on ne leur connaissait pas, veulent s’en tenir strictement  à une prétendue volonté populaire dont ils sont dans l’absolue incapacité d’indiquer le contenu.

La vérité est affligeante. Ils veulent se venger des refus successifs qu’ils ont essuyés. Et entendent condamner le peuple à rester, de fait, dans le statu quo institutionnel, la collectivité sans compétences nouvelles étant incapable de s’inscrire dans la logique de l’indispensable Projet de société. Convaincus qu’ils sont les seuls à savoir ce qui est bon pour le peuple martiniquais, ils ont décidé de le punir de son choix. « Vous n’avez pas voulu nous écouter, alors vous n’avancerez pas ». Posture arrogante et immorale d’une prétendue avant-garde politique.

A l’évidence, un débat serein ferait apparaitre que les divergences sont secondaires et augmenterait le capital confiance de nos compatriotes envers la classe politique dans son ensemble. C’est le sens de la décision de réunir le congrès des élus départementaux et régionaux.  Nos ultra-démocrates n’en veulent pas et se réfugient pour s’opposer à sa tenue derrière une lecture simpliste de la mission du congrès.  Celui-ci n’a aucun pouvoir de décision et les motions qu’il adopte doivent nécessairement, pour être prises en compte, avoir été votées par chacune des Assemblées délibérant séparément. Mais aucune disposition n’interdit que cet outil novateur soit utilisé pour informer tous les élus départementaux et régionaux des conclussions de la commission ad hoc et, par cette voie, en informer le peuple. C’est là une authentique démarche démocratique qui permettrait si les considérations subalternes ne l’emportent pas de faire émerger une volonté martiniquaise. Le Président de la République ne doit pas choisir pour nous. Parlons ensemble et décidons nous-mêmes de ce que nous voulons car « les Martiniquais sont les meilleurs experts des affaires martiniquaises ».

Jean-Claude William pour le MAP