Bondamanjak

Le photovoltaïque en Guadeloupe : une goutte d’eau dans l’océan !

Le lycée hôtelier du Gosier vient d'inaugurer les 2000 m2 de panneaux solaires installés sur ses toits et raccordés au réseau. Je suis favorable aux initiatives de ce genre, surtout lorsqu'elle s'intègrent bien dans le paysage, dans l'architecture et qu'elle restent malheureusement pionnières, donc avec une valeur d'exemple.

Toutefois, il convient de rappeler les ordres de grandeurs de cette réalisation : 258 MWh produits chaque année, cela ne fait "que" 700 kWh par jour, soit ce que consomment 84 foyers guadeloupéens (ou encore 0,06% des 145000 foyers que compte la Guadeloupe !).

Pour être encore plus précis, si on tient compte de l'ensemble de l'électricité consommée en Guadeloupe (donc par les ménages, les entreprises et les équipements publics) on arrive à une contribution très modique de 0,0155%, soit 1/ 6500 ème du total de l'électricité consommée.
Pour ramener encore plus cet investissement à sa juste proportion, on a observé entre 2005 et 2007 une hausse de la consommation annuelle de 84500 MWh, soit en moyenne 812 KWh de plus chaque semaine. Autrement dit, l'équipement du Lycée "efface" la croissance de la consommation globale acquise en 2 jours. Il faudrait construire 163 équipements équivalents chaque année pour que la consommation totale produite par d'autre moyen reste stable.

On voit donc bien que l'équipement en énergie photovoltaïque ne permettra pas à lui seul d'arriver à l'objectif de 50% d'autonomie énergétique avancé par la Région. Heureusement, Mme Borel-Lincertain est consciente de la chose et que très probablement cet objectif ne sera pas atteint, si on lit entre les lignes des propos reportés sur terre d'avenir : "Nous chercherons à atteindre d'ici 2020 50% d'indépendance énergétique. Un objectif élevé qui ne se fera pas bien évidemment sans une réelle maîtrise de la demande".

Si on veut atteindre cet objectif il faut mettre les bouchées doubles, car si on continue au rythme actuel de croissance de la consommation électrique (déjà en ralentissement par rapport aux années 1995-2005), c'est un besoin total de 40% plus élevé qu'il faudra produire en 2020. Et pour les produire avec 50% d'énergies renouvelables, il faudra multiplier par 5 la production de telles énergies. Et encore, je compte comme renouvelable aujourd'hui la production de la centrale bagasse-charbon, pour laquelle le moins que l'on puisse dire est que brûler du charbon n'est pas renouvelable !!
Quand bien même ce scénario serait réalisé, la part produite par le non renouvelable représenterait alors 70% de ce qui est produit aujourd'hui. Quel bel effort !! Quelle contribution à la lutte contre le réchauffement climatique !!

La seule manière de s'en sortir est donc de combiner :
1- une réduction drastique de la demande.
Les moyens existent, à confort identique, et à coût quasi nul. Seule manque la volonté individuelle et collective de le faire. N'oublions pas qu'économiquement ce serait une chance pour la Guadeloupe, car tout KWh non consommé est un KWh non produit, donc avec un coût nul.
2- un développement en parallèle les énergies renouvelables.

Pour en revenir à l'investissement de la Région et à ceux qu'elle projette dans les années qui viennent, il faut garder à l'esprit que ces investissements ne sont possibles que grâce aux financements publics du rachat de l'électricité par EDF, et qu'en gros, parce qu'ils rapportent de l'argent à la collectivité, ou du moins sont réalisés à coût nul. Profitons de cette situation, qui ne perdurera sans doute pas une fois les équipements solaires suffisamment développés, pour garantir une source de revenus à la collectivité régionale.
Mais intrinsèquement ces projets ne sont pas rentables avec un prix de vente du KWh inférieur à 0,2-0,3 euro. Si les panneaux solaires avaient servi à économiser en interne de l'énergie consommée par le lycée hôtelier, nul doute qu'ils n'auraient pas été réalisés !

Ce que j'aimerais donc, c'est qu'avant de mettre en place de tels équipements partout, avant de se donner une image écologique à peu de frais, la Région fasse réaliser un audit énergétique de ses bâtiments et prenne les mesures nécessaires pour diminuer leur consommation électrique. L'effet sera probablement moins clinquant, moins médiatique, mais il sera immédiat, sans un sou ou presque d'investissement, et durable. Et heureusement pour Victorin Lurel, il sera tout aussi valorisant sur le plan politique 😉 .

 

 Benoit Chauvin / http://cap21-antilles.over-blog.com