Bondamanjak

?Papa was a Rolling Stone »

 

 
Auteur de Papa was A Rolling Stone pour les Temptations, Norman Whitfield vient de mourir à Los Angeles des suites d’un diabète. Il n'avait pourtant pas le goût des mélodies sucrées dont raffolait Motown et qui firent la gloire des Supremes ou de Smokey Robinson. Né à Harlem en 1948, Whitfield était un enfant du rock autant que de la soul. Après avoir déménagé pour Detroit et rejoint Motown au début des années 60, il s'est fait les griffes sur quelques chansons habilement calibrées (Needle in a haystack ou Ain't to proud to beg, que les Rolling Stones reprendont avec panache dans les années 70), mais  son talent s'est dévéloppé hors cadre sous l'influence de l'explosion pyschédélique des années hippies. Depuis son QG de Detroit, Whitfield ne perdait pas une miette de ce qui se passait en Californie, du côté des Doors ou de Sly and The Family Stone, dont il a largement copié le style flamboyant et le funk-rock en fusion pour faire entrer Motown dans une nouvelle ère.

En 1967, année psychédélique, il prend son envol et signe I heard it through the grapevine pour Gladys Knight and the Pips. Marvin Gaye puis  Creedence Clearwater Revival reprendront très vite la chanson pour en faire un des grands tubes fiévreux de l'époque : Norman Whitfield est lancé, on ne l'arrêtera plus. Entre 68 et  72, il compose et produit Cloud 9, Psychedelic Shack, Ball of confusion, Just my imagination et Papa was a Rolling Stone, qui font des Temptations les nouveaux dieux de l'amérique noire. Le style est débridé, les morceaux s'étirent à l'infini dans un halo de réverbérations grandioses, les harmonies vocales planent sur une musique gorgée d'effets surexcitants. Avec ce producteur allumé, la Motown ne perd rien de son époque. En 1970, Whitfield compose pour Edwin Starr, War, un des grands tubes de la lutte contre la guerre du Vietnam, et ses chansons préfigurent un virage politique et social qui aboutira au What's going on de Marvin Gaye. Dans les années 70, le déclin de Whitfield accompagne celui de son label, et le triomphe de Car Wash dans les années disco restera son dernier fait d'arme. Mais les années du repli sont aussi celles où il lance sa popre créature, Undisputed Truth, petit monstre de pop baroque qu'il a créé de toute pièce et qu'il a taillé à sa démesure. Sous sa houlette, le groupe a enregistré quelques albums cultes qu'il est temps de redécouvrir.