Bondamanjak

Une élection républicaine n’est pas une élection de « reine de Carnaval »


Une grande séquence politique s’annonce ! Les élections nationales occupent le terrain des grands médias, les élections locales s’approchent.
Bientôt, nous allons suivre les grands matchs électoraux télévisuels en famille, installés confortablement dans un canapé et munis de chips, d’accras et de sodas…
Tout cela est-il étranger à notre vie spirituelle ? Certainement pas ! En nous appelant à voter, le système démocratique impose un engagement moral de chaque citoyen. Le mot « voter » vient du latin « votum », le vœu, et du verbe « volare » qui veut dire « vouloir ». Voter, c’est exprimer un vœu, c’est donc engager sa volonté. Donner son vote est un acte qui implique tout notre âme : notre intelligence, notre liberté, notre spiritualité.
S’abstenir, sauf raison grave (la santé par exemple), est une démission face à notre responsabilité de chrétien et de citoyen.
C’est pourquoi le Catéchisme de l’Eglise Catholique, en commentant la Parole de Dieu (Rm 13,1-2) affirme que la soumission à l’autorité et la coresponsabilité du bien commun exigent moralement l’exercice du droit de vote (CEC 2240).
Si aucun candidat ne nous paraît digne de confiance, on peut voter « blanc », mais on ne peut pas dire que le Christ nous envoie dans le monde et s’abstenir de cet engagement en disant : « sa pa zafè mwen ». L’Eglise nous oblige donc à participer aux élections. Par exemple, les jours de scrutins, même les religieux contemplatifs, qui ne sortent jamais de leur monastère, se rendent au bureau de vote !
Une élection républicaine n’est pas une élection de « reine de Carnaval » ! Ce n’est pas en fonction de l’applaudimètre, du nombre de « sé li nou lé » ou « nou pa lé’y » de la foule, qu’on choisit de confier, ou pas, des responsabilités politiques à un candidat ou à une équipe. L’Histoire nous montre comment un vote « charnel », nourri par la peur, la colère, la vengeance ou même la sympathie médiatique, peut porter au pouvoir des candidats aux projets mortifères et sectaires, aux mains de puissances ténébreuses. Autrement dit, on ne vote pas n’importe comment ! Le vote ne doit pas se faire sur des critères charnels, c’est-à-dire affectifs (« j’aime » / « j’aime pas »), mais bien sur des critères spirituels, objectifs et raisonnés.
Pour un disciple du Christ, c’est une faute devant Dieu de voter sans savoir pour qui et pour quoi on vote, en se laissant plus ou moins influencer par les médias ou les affects. Chacun doit discerner en conscience, avec des critères objectifs, c’est-à-dire réfléchir, peser et soupeser dans l’Esprit-Saint, les programmes des candidats ! L’Eglise ne donne généralement pas des consignes de vote, mais elle se réserve le droit de souligner les principaux enjeux de chaque élection et de dénoncer ce qui est incompatible avec l’Evangile dans le discours politique. Je salue à ce titre l’initiative des Mouvements d’Action Catholique de demander aux candidats de s’expliquer Face aux Chrétiens ce 22 novembre 2015 : nul doute que ce meeting-là nous aidera à accomplir intelligemment notre devoir électoral.
Pour aider notre discernement, je voudrais citer ici le discours final de Mgr Georges Pontier, président de la Conférence des évêques de France, lors de la dernière assemblée des évêques à Lourdes : Nous portons de l’estime à l’engagement politique. Avons-nous autre chose à dire à nos fidèles que d’aller voter ? Sûrement. Nous voulons ajouter : pensez au sort des petits et des humbles ; pensez à l’accueil, pensez au respect de la vie et de la dignité de la personne humaine ; pensez aux politiques sociales et familiales, à l’éducation des jeunes ; fuyez la violence sous toutes ses formes, la violence verbale n’étant pas la moindre. Regardez de près les programmes.
En résumé, c’est à la lumière de la Parole de Dieu que nous devons juger les idées des candidats et faire notre choix, car, en Vérité, il n’y a pas d’autre programme électoral que l’Evangile, il n’y pas d’autre roi que le Christ Jésus : sé Li nous lé !

+ David Macaire
Archevêque de Saint-Pierre et Fort-de-France

Source : http://martinique.catholique.fr/se-li-nou-le