Le dîner du 30 septembre 2025 à l’Élysée a offert une image rare : une délégation martiniquaise parlant d’une seule voix devant le chef de l’État. Mais derrière cette unité affichée, les positions révèlent des nuances marquées, parfois des contradictions.
Des députés plus affirmés
À l’Assemblée nationale, les élus se sont montrés relativement clairs :
• Jiovanny William insiste sur la nécessité d’une consultation populaire avant toute réforme, plaçant le peuple martiniquais au centre du processus.
• Marcellin Nadeau parle d’un « changement de paradigme » et d’une autonomie à bâtir sur la base d’un consensus.
• Béatrice Bellay met en garde contre tout « troc social », refusant que l’égalité républicaine soit la monnaie d’échange d’un nouveau statut.
• Jean-Philippe Nilor, fidèle à sa ligne de longue date, défend une autonomie affirmée, inscrite dans une logique identitaire et politique.
Malgré leurs nuances, ces voix partagent une volonté d’avancer, avec des lignes rouges posées clairement.
Des sénateurs à la parole évasive
À l’inverse, les sénateurs martiniquais ont adopté un ton beaucoup plus réservé :
• Frédéric Buval s’est limité à rappeler l’importance du dialogue et du calendrier, sans se prononcer sur le fond.
• Catherine Conconne, habituellement plus loquace et incisive, a surpris par une retenue inhabituelle. Elle s’est contentée d’évoquer une « tendance nationale » vers un desserrement de l’étau étatique, sans aborder directement les articles 73 ou 74.
Leur prudence, qui vire parfois au flou, tranche avec la lisibilité des positions des députés.
Et Serge Letchimy, chef de file prudent.
Dans ce paysage contrasté, Serge Letchimy s’impose comme chef de file de la délégation. Président du Conseil exécutif de la CTM, il a salué un « grand pas franchi » et la mise en place d’un calendrier précis, tout en appelant à une extrême prudence. Pour lui, chaque territoire ultramarin doit suivre sa propre voie : certains veulent évoluer, d’autres non, et cette différenciation doit être respectée.
En se posant en porte-parole unitaire, Letchimy assume son rôle de pivot : rassembler sans diviser, avancer sans brusquer.
Prudence calculée ou silence pesant ?
L’unité martiniquaise affichée à l’Élysée masque donc une réalité contrastée. Les députés donnent l’impression d’un cap, avec prudence mais sans ambiguïté. Les sénateurs, eux, s’en tiennent à une parole évasive voire passive, difficilement lisible, comme si le poids de leurs équilibres locaux les condamnait à rester en marge du débat de fond. Ainsi fond, fond, fond…les petites marionnettes ?