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« Mon rêve… Devenir caissière comme maman »

« Mon rêve… Devenir caissière comme maman »

Alors que dans certaines contrées du monde de France et surtout de Navarre, les petites filles rêvent de devenir vétérinaire, institutrice, danseuse ou encore youtubeuse, celles des quartiers populaires de Fort-de-France en Martinique rêvent de leur réalité. Est-ce donc un rêve si c’est à ce point ancré dans ce réel si affligeant ?

A la rentrée des classes, sur les fiches de renseignement,  une jeune enseignante découvre avec stupéfaction que les élèves de sa classe veulent devenir pour la majorité,«caissière»  pour les filles et « vendeur de moutons » pour les garçons.

Oui, il reste deux ou trois petits sportifs qui se voient incarner les prochains Neymar ou M’Bappé sans pour autant projeter d’aller dans un centre de formation du coin s’il y en a un. 

Vous me direz qu’il n’existe pas de sous-métier et qu’il faudrait encourager ces enfants à réaliser leur «rêve» de grandeur ou plutôt de grande surface.

Alors, on tentera d’utiliser de belles périphrases afin de rendre plus «vendeur» ces fabuleux métiers : «hôtesse de caisse», «hôte de caisse» et on gardera «vendeur de moutons» parce que c’est exactement le métier que fait papy qu’on aime et qu’on respecte.  Elle n’est pas « bêle » la vie. Oui à notre avis.

«Où sont les filles avec leurs rêves pleins de charmes?» Elles sont bien déterminées à devenir caissières. « Caissière comme maman, annonce X  parce que…même si elle est fatiguée quand elle rentre du travail et qu’elle nous crie dessus, elle achète des vêtements sur des sites chinois, a toujours de beaux et longs ongles , de beaux tissages et qu’elle dépose mes frères et sœurs et moi tous les vendredis soirs chez mamie pour qu’elle puisse aller danser avec ses copines. » 

Tahar Ben Jelloun disait qu’ « on est tous à la recherche d’une frontière, une ligne claire entre le rêve et la réalité. »

Ici, en Martinique, la factice frontière demeurera le gourmand tapis roulant de la caisse du non-développement personnel et plus si affinités. Antoine Crozat doit être fier de nous.