« Si on se place dans l’inscription régionale, on doit aussi s’inscrire dans la différenciation des droits » Emmanuel Macron à la volée.
Stupeur, ébahissement, yeux hagards, sourires pincés. Les élus de l’Outre-mer, qui avaient répondu à l’invitation à diner du Président de la République, ne savaient plus où se mettre. Ils ne s’y attendaient apparemment pas. Il en manquait quelques-uns comme Lurel et Bello, ou Serville, mais les nôtres étaient tous là, comme s’ils n’avaient pas suffisamment montré leur incapacité à répondre aux attentes de la population de Martinique.
C’est ce que, pendant ce temps en Martinique, Yann Monplaisir, dans un texte d’une lucidité implacable « Pourquoi je ne participerai pas au Congrès des Élus de Martinique », torpillait la démarche de Serge Letchimy et de ses acolytes tous engagés dans une fuite en avant incompréhensible pour la population.
Parce que, dans la situation actuelle, locale, française, mondiale, seulement des gens hors-sol, complètement coupés des réalités peuvent s’obstiner, envers et contre tout.
Si’w pa kontan, pran kay-ou
Le titre en créole, qui est plus une interprétation des propos du Président qu’une traduction, ne laisse pas de place à la subtilité, aux nuances contenues dans sa phase et surtout à toute l’ironie de la sentence mais traduit de façon réaliste ce qu’il a dit.
On pourrait la traduire comme « Si zòt lé mété kò-zot an lwa-zot, fok mété kò-zot an dwa-zot » autrement dit « Si zot pa kontan, pran kay-zot ».
C’est ce que veut la Kanaky : pran kay-li, et pourtant les élus n’ont pas été invités à ce dîner à huis clos. Ce qui n’a pas trop chagriné certains élus de la Caraïbe, pourtant de toutes les manifestations pro-kanaky, bien présents au gueuleton.
Mais, clairement, quel crédit donner à tout ça ?
Un rapport d’information fait au nom de la Délégation aux Outre-mer en conclusion des travaux d’une mission d’information sur l’avenir institutionnel des outre-mer par MM. Philippe GOSSELIN et Davy RIMANE, surprenant quand, par exemple, on constate les identités de ceux qui ont été auditionnés (notamment pour chez nous) ? Ou encore quand ce texte cite Claude Lise comme « ancien président du conseil territorial de Martinique » ? Personne ne connait cette instance en Martinique. Et, quand la Martinique est absente de la liste des 30 recommandations où toutes les possessions de la France en outre-mer sont citées SAUF LA MARTINIQUE.
Nous n’avons pas lu les 178 pages du rapport. Tout simplement parce que ces quelques perles trouvées juste en survolant quelques pages du document suffisent à nous rendre méfiants et attentifs et à rendre ce texte suspect. Vraiment. Parce que, si en quelques pages, de ce que nous connaissons il est aussi facile de trouver ces bizarreries (pour ne pas être méchant) qu’est-ce que ça doit être dans le reste du rapport ?
Notre avenir dans un bwè-manjé
Pendant que partout où les compétences sont domiciliées localement, où les élus locaux ont les responsabilités, ça coince : SMTVD, Transports collectifs, sécurité dans les établissements scolaires, eau, réseaux routiers, …
C’est au cours d’un diner à l’Elysée, avec le Président de la République alors que la France n’a pas de Gouvernement depuis plusieurs semaines, le démissionnaire expédiant les affaires courantes, et sur la base de ce machin que nos avenirs allaient se décider ?
Ho, les yéyés, vous êtes sérieux là ?
« Laklé-mwen an lanmen-mwen
Pèsonn pa ka di mwen
Yéyé la’w sòti
Si mwen santi mwen gran
Fok mwen gran toupatou
Fok mwen ranjé kò-mwen
Laklé-mwen an lanmen-mwen
Pèsonn pa ka di mwen
Yéyé la’w sòti »
Eugène Mona
Sources : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/rapports/om/l17b0774_rapport-information#_Toc256000598
Extraits :
Liste des personnes auditionnées en Martinique
H. Auditions réalisées du 18 au 20 avril en Martinique
Jeudi 18 avril 2024 :
Mairie de Fort‑de‑France
– M. Didier Laguerre, maire ;
– Mme Viviane Capgras ;
– M. Dario Rengassamy, directeur de cabinet ;
Conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation
– M. Éric Bellemare, président
– Mme Catherine Delbé, directrice de cabinet;
Assemblée de Martinique
– M. Lucien Saliber, président, président du congrès des élus ;
– M. Marie-Georges Dronnier, directeur de cabinet ;
Vendredi 19 avril 2024 :
– M. Claude Lise, ancien sénateur, ancien député, ancien président du conseil général et ancien président du conseil territorial de Martinique ;
Association des maires de Martinique
– M. Justin Pamphile, président, maire du Lorrain ;
– Jacky Sinosa, directeur ;
Collectivité territoriale de Martinique
– M. Serge Letchimy, président ;
– M. Johnny Hajjar, ancien député ;
– M. Jean-Philippe Nilor, député, co‑président de Péyi-A.
Samedi 20 avril 2024 :
Table ronde avec les chambres consulaires
– M. Louis-Daniel Bertome, vice-président de la chambre d’agriculture de Martinique ;
– M. Alain Clio, élu à la chambre de commerce et d’industrie de Martinique ;
– M. Tony Boclé, vice-président de la chambre de commerce et d’industrie de Martinique ;
– M. Salomon Henry, président de la chambre des métiers et de l’artisanat de Martinique,
– M. Philippe Jock, président de la chambre de commerce et d’industrie de Martinique
– M. Jean-Baptiste Rosten, directeur général de la chambre de commerce et d’industrie de Martinique.
Auditions réalisées en mai 2024 À l’Assemblée nationale
Jeudi 16 mai 2024
– Mme Catherine Conconne, Sénatrice de la Martinique
– M. Jean-Christophe Bouvier, Préfet de la Martinique
Recommandations d’ordre général
Recommandation n° 1 (p. 45) : demander au gouvernement de conduire jusqu’à son terme, c’est-à-dire jusqu’au référendum final, le processus institutionnel engagé dans chaque territoire souhaitant une évolution de son statut.
Recommandation n° 2 (p. 41) : demander au gouvernement de prendre en compte le souhait de modifications normatives et réglementaires de façon efficace et concrète et de mettre en œuvre, lorsque c’est possible, un travail d’équivalence entre les normes européennes et celles des pays du voisinage des outre-mer.
Recommandation n° 3 (P. 41) : simplifier les dispositions organiques relatives à la procédure d’habilitation prévue par l’article 73 de la Constitution.
Recommandation n° 4 (P. 45) : informer largement les populations ultramarines sur les processus institutionnels en cours de manière à ce que les consultations prévues localement se déroulent en toute connaissance de cause.
Recommandations concernant La Réunion
Recommandation n° 5 (p. 85) : relancer un nouvel exercice d’harmonisation des compétences entre la région et le département de La Réunion afin de pousser vers plus de cohérence.
Recommandation n° 6 (p. 83) : permettre au conseil régional de participer aux échanges internationaux relatifs à l’environnement international de l’île, notamment lorsque le gouvernement français n’est pas représenté.
Recommandations concernant Mayotte
Recommandation n° 7 (p. 103) : transformer le conseil départemental de Mayotte en assemblée territoriale unique dotée des compétences d’un conseil régional, à l’exemple de la Martinique ou de la Guyane.
Recommandation n° 8 (p. 104) : dans l’hypothèse où la création d’une assemblée territoriale unique serait actée, remplacer le scrutin départemental par circonscription par un scrutin à la proportionnelle. Ajuster le nombre de conseillers.
Recommandation n° 9 (p. 93) : établir et publier régulièrement des données fiabilisées sur la population présente à Mayotte, qu’elle soit française ou étrangère, qu’elle réside sur l’archipel de manière licite ou illicite.
Recommandation n° 10 (P. 106) : aligner le niveau des prestations sociales versées à Mayotte et celui des prestations servies dans le reste du pays.
Recommandation n° 11 (P. 96) : rééquilibrer les effectifs administratifs de la préfecture, manifestement sous-dimensionnés par rapport aux départements de taille comparable.
Recommandations concernant la Guyane
Recommandation n° 12 (p. 144) : demander au gouvernement de relancer le processus de discussions de manière à faire aboutir l’évolution institutionnelle en Guyane.
Recommandation n° 13 (p. 128) : dans l’hypothèse où le nouveau statut de la Guyane serait adopté, aligner le statut des lois Péyi sur celui des lois de pays de la Nouvelle-Calédonie, de manière à leur faire acquérir un statut quasi législatif.
Recommandations concernant la Guadeloupe
Recommandation 14 (p. 199) : revoir la carte des intercommunalités de la Guadeloupe.
Recommandation 15 (p. 194) : réfléchir à la mise en place d’une délégation de service public pour la desserte aérienne de Marie-Galante sur le modèle de ce qui existe à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Recommandations concernant Saint-Martin et Saint-Barthélemy
Recommandation n°16 (p. 215) : finaliser la mise en place de la préfecture de plein exercice et du tribunal judiciaire.
Recommandation n°17 (p. 216) : poursuivre la réflexion sur la décentralisation d’autres services de l’État tels que le rectorat et l’agence régionale de santé.
Recommandation n°18 (p. 217) : encourager et faciliter les projets de coopération entre la collectivité française de Saint-Martin et Sint-Maarten, pays constitutif du Royaume des Pays-Bas.
Recommandation n°19 (p. 220) : mettre en place une « clause de revoyure » permettant une évolution pragmatique et souple du statut de Saint-Barthélemy à intervalles réguliers.
Recommandation concernant Saint-Pierre et Miquelon
Recommandation n°20 (p. 230) : mettre en place au niveau de l’État un système d’expertise permettant de valider des équivalences ou des dérogations en matière de normes, au moins pour les matériaux de construction et les activités liées aux travaux publics.
Recommandation concernant la Nouvelle-Calédonie
Les rapporteurs, compte tenu de la nécessaire relance du dialogue entre loyalistes et indépendantistes, estiment à ce stade prématuré de formuler des recommandations pour ce territoire.
Recommandations concernant Wallis et Futuna
Recommandation 21 (p. 292) : modifier le mode d’élection de l’Assemblée territoriale de Wallis et Futuna pour adopter un vote à la représentation proportionnelle en lieu et place de l’actuel scrutin par circonscriptions.
Recommandation 22 (p. 293) : mener une réflexion sur le nombre de conseillers de l’Assemblée territoriale de Wallis et Futuna dont le nombre devra être impair.
Recommandation 23 (p. 294) : actualiser le domaine de compétence de l’Assemblée territoriale de Wallis et Futuna.
Recommandation 24 (p. 295) : transférer de manière progressive, avec une phase transitoire de cinq à dix ans, le pouvoir exécutif du préfet à la collectivité de Wallis et Futuna.
Recommandation 25 (p. 294) : augmenter la durée des sessions de l’Assemblée territoriale de Wallis et Futuna.
Recommandation 26 (p. 301) : modifier les décrets du 25 juin 1934 et du 22 juillet 1957 pour que, à Wallis et Futuna, la compétence en matière foncière soit officiellement transmise aux autorités coutumières.
Recommandations concernant la Polynésie française
Recommandation 27 (p. 340) : inscrire le statut de la Polynésie française dans un titre spécifique de la Constitution, à l’instar de ce qui a été fait pour la Nouvelle-Calédonie.
Recommandation 28 (p. 319) : favoriser le débat sur la création de communautés d’archipels fédérées autour de compétences précises dans le respect de l’intégrité de la Polynésie française.
Recommandation 29 (p. 338) : aligner le statut des lois de pays de Polynésie française sur celui des lois de pays de Nouvelle-Calédonie, de manière à leur faire perdre leur statut d’acte administratif au profit d’un statut quasi-législatif.
Recommandation 30 (p. 341) : réfléchir à un ajustement de la prime majoritaire accordée au parti arrivé en tête aux élections territoriales de manière à assurer une majorité stable au parti vainqueur tout en permettant une représentation équilibrée des groupes d’opposition.