Alors que la ville peine à se relever d’années de désengagement citoyen, plusieurs agents municipaux dénoncent, sous couvert d’anonymat, un système verrouillé, centralisé autour d’un cabinet tout-puissant et déconnecté de la réalité des Foyalais.
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❓ Comment décririez-vous le fonctionnement actuel de la mairie ?
Employé A :
« Tout est centralisé. Aucune décision ne se prend sans passer par le cabinet. Même pour les sujets purement administratifs, le directeur de cabinet veut valider, contrôler, superviser. Il se mêle de tout, même de ce qui relève des services techniques ou des ressources humaines. »
Employé B :
« Ce n’est plus un rôle de coordination, c’est un rôle d’ingérence. Normalement, le cabinet définit la ligne politique, pas le fonctionnement interne de la mairie. Ici, tout est confondu. »
Employé C :
« Il élimine ceux qui pourraient le contredire ou simplement faire mieux. Les personnes compétentes sont mises à l’écart parce qu’elles gênent. Ce n’est pas un hasard si les meilleurs finissent par partir. »
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❓ Les Foyalais semblent se détourner de la vie politique locale. Comment l’expliquez-vous ?
Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
• En 2014, avec 59 % d’abstention, le maire avait réuni 12 839 voix.
• En 2020, le taux d’abstention est monté à 75 %, et le maire n’a recueilli que 9 714 voix sur 60 810 inscrits.
👉 En six ans, plus de 3 000 électeurs ont disparu des urnes, et les trois quarts des Foyalais ont choisi de ne plus voter.
Employé A :
« Les Foyalais ne se reconnaissent plus dans la gestion actuelle. Ils voient bien que la mairie tourne sur elle-même, sans lien avec le quotidien des habitants. »
Employé B :
« L’abstention, c’est le symptôme d’une ville fatiguée. Les gens ne croient plus que leur voix change quoi que ce soit. Et à l’intérieur, nous, agents, on ressent la même lassitude. »
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❓ Le directeur de cabinet semble pourtant rester en place malgré les critiques. Pourquoi ?
Employé C :
« Parce qu’il est intouchable. C’est lui qui tient la machine, ou du moins qui le fait croire. Il est à la fois chef d’orchestre, censeur et filtre. Tout passe par lui. »
Employé A :
« Le problème, c’est qu’il ne joue plus son rôle de stratège politique. Il s’impose dans la gestion, dans les recrutements, dans les décisions techniques. Il gouverne sans être élu. »
Employé B :
« Et quand il y a des difficultés, c’est toujours le maire qui encaisse. Lui, il passe entre les gouttes. Dans les affaires judiciaires ou les polémiques, il est toujours là, mais jamais responsable. »
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❓ Le maire porte-t-il une part de responsabilité dans cette situation ?
Employé A :
« Oui. Par manque d’autorité, sans doute. Ou par peur de casser un équilibre qu’il croit maîtriser. Mais à force de ne pas décider, il se tire une balle dans le pied. »
Employé C :
« Le maire est prisonnier de son entourage. Il a laissé un cabinet trop fort, trop présent. Et aujourd’hui, il en paie le prix politiquement. »
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❓ Quelles sont les conséquences pour les agents et pour la ville ?
Employé B :
« L’administration est à bout. Les agents sont fatigués, démotivés, parfois en souffrance. Les projets n’avancent plus, les décisions sont lentes, et les habitants ne voient plus de résultat concret. »
Employé A :
« Les Foyalais méritent mieux. Fort-de-France a besoin d’un souffle neuf, d’une mairie qui écoute, pas d’un appareil politique enfermé dans ses propres certitudes. »
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(Propos recueillis auprès d’agents municipaux de Fort-de-France. Les prénoms ont été modifiés pour préserver leur anonymat.)











